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Correction de l’épreuve de droit des obligations du CRFPA 2019

La présente page contient une proposition de correction complète de l’épreuve de droit des obligations de l’épreuve du CRFPA 2019. Ce corrigé ne prétend pas à l’exhaustivité : d’autres éléments non compris dans cette correction pourront très certainement être ajoutés et apporter des points.

 

correction-droit-des-obligations-crfpa-2019-2020

 

Cher Maître,

Vous trouverez ci-dessous un projet de consultation juridique à adresser à la société LawEquity en réponse aux questions posées.

Dans l’attente de pouvoir en discuter avec vous et de pouvoir éventuellement approfondir certains points,

Cordialement,

Votre stagiaire

***

Cher Monsieur,

Vous trouverez ci-dessous des éléments de réponses à vos questions.

A titre liminaire, je me permets de rappeler brièvement les faits.

Je comprends qu’en novembre 2016, la société LawEquity a acquis des parts de la société « les éditions JusLux » (ci-après, la société « JusLux »), auprès de Monsieur François Jus. Ces parts représentent 50 % du capital de la société JusLux.

Vous m’avez d’abord indiqué que le prix de cession desdites parts, de 6 000 000 euros, a été (notamment) fixé au regard d’un « audit » effectué par l’ancien commissaire aux comptes de la société JusLux. Or, les résultats réalisés au regard des derniers éléments comptables, sont d’après vos dires, largement en deçà des résultats escomptés.

Nous envisagerons la possibilité d’obtenir la nullité du contrat, ainsi que la restitution du prix de cession, et des dommages et intérêts (I).

Ensuite, vous m’avez fait part, d’un engagement de François Jus à l’égard de la société LawEquity, à obtenir « dans les meilleurs délais » que son frère Antoine Jus vous cède ses propres parts de la société, pour un prix de 5 000 000 euros. Lesdites parts représentent également 50 % du capital de la société JusLux. L’acquisition des parts appartenant à Antoine Jus vous permettrait ainsi de détenir 100 % du capital de la société JusLux.

Cet acte prévoit qu’en cas d’inexécution, la somme de 980 000 euros vous sera versée. Finalement, Antoine Jus ne vous a jamais vendu ses parts et vous avez reçu un courrier de François Jus vous informant de la résiliation de son engagement.

Nous étudierons dans quelles conditions nous pouvons invoquer l’inexécution, puis la résiliation abusive de cet engagement, ainsi que le paiement de la somme susmentionnée (II).

Enfin, vous souhaitiez savoir si une action contre l’ancien commissaire aux comptes ayant fourni l’« audit » à l’appui duquel le prix de cession a été fixé, été envisageable (III).

 

I/ Le sort du contrat de cession des parts de François Jus 

Après avoir déterminé le corps de règles applicables (A), nous envisagerons la question de la nullité (B), puis celle de la restitution du prix, et/ou des dommages et intérêts (C).

A/ Les dispositions juridiques applicables

A titre liminaire, il convient de noter que l’acte de cession de parts sociales de la société JusLux est soumis aux dispositions du code civil telles qu’elles sont issues de l’ordonnance de réforme du droit des obligations. En effet, aux termes de l’article 9 de ladite ordonnance, celle-ci est applicables aux contrats conclus à compter du 1er octobre 2016.

Le contrat de cession ayant été conclu en « novembre 2016 », les dispositions issues de la réforme du droit des obligations sont applicables.

B/ La question de la nullité

Afin de solliciter la nullité du contrat, il conviendrait ici de démontrer que l’une des conditions nécessaires à sa « validité » au sens de l’article 1128 du code civil n’est pas réunie.

Trois conditions sons « nécessaires à la validité d’un contrat » : le consentement des parties, leur capacité de contracter, un contenu licite et certain. Il conviendra de s’intéresser ici au consentement, et plus exactement à l’intégrité du consentement.

L’article 1129 évoque trois vices du consentement : l’erreur, le dol, et la violence. Il convient ici de s’attarder sur l’erreur (1) et le dol (2).

1/ L’erreur

a/ Les règles applicables

D’après l’article 1132 du code civil, l’erreur est une cause de nullité « lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou celle du cocontractant ». Les qualités essentielles de la prestation sont, selon l’article 1133 du code civil, « celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté ». Aussi, l’alinéa 3 de ce même article prévoit que « l’acceptation d’un aléa sur une qualité de la prestation exclut l’erreur relative à cette qualité ».

Enfin, aux termes de l’article 1136 du code civil « l’erreur sur la valeur par laquelle, sans se tromper sur les qualités essentielles de la prestation, un contractant fait seulement de celle-ci une appréciation économique inexacte, n’est pas une cause de nullité ».

b/ L’application des règles en l’espèce

En l’espèce, vous m’avez indiqué que les résultats réalisés par la société JusLux sont bien en deçà des résultats « escomptés ».

Or, il ressort expressément de l’article 1136 du code civil que l’erreur ne peut porter sur la valeur. Ainsi, la question est de savoir ici d’où provient la détermination des résultats « escomptés » ou « projetés ».

Si les résultats projetés proviennent d’une appréciation économique réalisée par vous-même, alors l’erreur ne peut être invoquée.

En revanche, si les résultats projetés proviennent d’une appréciation économique réalisée à la lumière d’informations qui vous auraient été communiquées par votre cocontractant François Jus, ou d’un tiers (en l’occurrence l’ancien commissaire aux comptes de la société), alors une action fondée sur l’erreur est envisageable. Il s’agira alors d’une erreur « provoquée », par des informations qui se seraient révélées inexactes, à savoir en réalité d’un « dol ».

Pour cette raison, le fondement du dol apparait, à mon sens, plus adapté.

2/ Le dol

a/ Les règles applicables

Aux termes de l’article 1137 du code civil, le dol peut résulter, soit de manœuvres dolosives ou mensonges, soit d’une réticence dolosive d’une information manifestement déterminante pour l’autre partie. Il résulte aussi de l’article 1138 du code civil, que le dol peut provenir d’un tiers de connivence, en l’occurrence ici du commissaire aux comptes.

Aussi, et selon une jurisprudence constante qui a « survécu » à la réforme du droit des obligations, l’intention dolosive doit être démontrée (Cass., Civ.1re, 19 septembre 2018, n°16-20.164).

b/ L’application des règles en l’espèce

En l’espèce, le dol peut être invoqué ici, si vous parvenez à démontrer que Monsieur François Jus, et/ou son commissaire aux comptes, vous ont intentionnellement fourni des informations fausses, ou ne vous intentionnellement pas fourni des informations importantes (réticences dolosives).

Vous devez également démontrer que ces informations ont été « déterminantes de votre consentement » (au sens de l’article 1130 du code civil), à savoir que sans elles, vous n’auriez pas acquis les parts de la société JusLux, ou que vous les auriez acquis à des conditions substantiellement différentes (comme par exemple, à un prix bien en deçà de 6 000 000 euros).

Parmi les informations fausses, nous pouvons citer par exemple :

  • Des documents comptables falsifiés (exemple : oubli d’une provision importante)
  • Une étude de marché manifestement mensongère, alors que vous m’indiquez que la concurrence sur le marché est très importante.

S’agissant du fait que « plusieurs des marchés n’ont pas été conclus, ou renouvelés », il me semble que cet élément est sans incidence, à moins que François Jus se soit engagé sur la conclusion ou le renouvellement de ces contrats (via une clause de garantie de passif et d’actif spécifique, ou un contrat de garantie de passif et d’actif autonome, par exemple).

C/ La demande de restitution du prix de cession ou des dommages et intérêts

Invoquer le dol peut permettre de solliciter la nullité du contrat (1) ou des dommages et intérêts (2).

1/ La nullité du contrat et la restitution du prix

L’article 1178 du code civil prévoit que le défaut d’une des conditions de validité d’un contrat entraîne sa nullité. Cette nullité signifie que le contrat n’est censé n’avoir jamais existé, ce qui implique alors une obligation de restitution réciproque.

En conséquence, la nullité du contrat de cession de part impliquerait l’obligation pour Monsieur François Jus de vous restituer le montant de la cession des parts, à savoir 6 000 000 euros. Réciproquement, la société LawEquity ne sera plus propriétaire des parts de la société JusLux. Ainsi, si vous souhaitez garder vos parts dans la société LawEquity, vous pouvez simplement solliciter des dommages et intérêts (action indemnitaire), plutôt que la nullité.

2/ L’action en dommages et intérêts

Selon l’alinéa 4 de l’article 1178 du code civil, et une jurisprudence constante (Cass. Com., 10 juillet 2012, n°11-21.954), le dol peut également donner lieu à une action en dommages et intérêts. Il conviendra alors d’agir sur le fondement extracontractuel (articles 1240 et 1241 du code civil), et de démontrer une faute, un préjudice, et un lien de causalité.

En l’espèce, la faute est constituée par le fait d’avoir communiqué à la société LawEquity une ou plusieurs informations fausses, ou au contraire de ne pas avoir communiqué des informations importantes. Le préjudice pouvant être invoqué peut-être la perte de chance d’avoir pu mieux négocier le prix de cession et la perte de chance d’avoir pu réaliser un autre investissement, en achetant les parts d’une autre société concurrente avec laquelle vous étiez peut-être également en relation. Le lien de causalité entre la faute précontractuelle et le préjudice dont il pourra être demandé réparation sera plus facilement démontré.

 

II/ Le sort de l’engagement de François Jus au sujet des parts de son frère Antoine Jus

Il conviendra de qualifier juridiquement les faits (A), avant de déterminer le régime applicable (B). Puis, je vous donnerai mon analyse sur la résiliation, par François Jus, de son engagement (C). Enfin, j’évoquerai la question de la combinaison d’une action en nullité du contrat de cession de parts et de l’action en paiement de l’indemnité prévue (D).

A/ La qualification juridique des faits et actes  

Nous sommes en présence d’un engagement de porte-fort (1) et d’une clause pénale (2).

1/ Une promesse de porte-fort

Je comprends qu’au même moment que la cession des parts sociales de François Jus, ce dernier s’est également engagé à obtenir que « dans les meilleurs délais », son frère Antoine Jus (qui possède 50 % des parts de la société JusLux) vous cède ses parts, à un prix déterminé de 5 000 000 euros.

Il s’agit d’un engagement de porte-fort, défini à l’article 1204 du code civil comme le fait de promettre « le fait d’un tiers ».

La promesse de porte-fort est contrat par lequel une personne (le promettant – ici Monsieur François Jus), s’engage à l’égard d’une autre personne (le bénéficiaire – ici la société LawEquity), à ce qu’un tiers (le tiers – ici Antoine Jus) exécute une obligation.

Il s’agit, plus spécifiquement, d’un « porte-fort d’exécution » (à l’opposé d’un « porte-fort de ratification »), à savoir un engagement de garantir l’exécution d’une obligation par un tiers.

2/ Une clause pénale

La promesse de porte-fort susmentionnée prévoit également qu’« en cas d’inexécution, [Antoine Jus] devra indemniser sa cocontractante à hauteur 980 000 euros ».

Il s’agit d’une clause pénale, à savoir une clause qui fixe un montant forfaitaire prédéterminé, dû à titre de dommages et intérêts en cas d’inexécution. Son régime est principalement prévu à l’article 1231-5 du code civil.

B/ Le régime applicable

Il me parait important de vous donner ici quelques informations sur le régime juridique de la promesse de porte-fort (1) et de la clause pénale (2).

1/ Le régime de la promesse de porte-fort

La promesse de porte-fort est évoquée à l’article 1204 du code civil, à savoir au sein du Chapitre VI « les effets du contrat ». La promesse de porte-fort est donc un contrat, et en tant que tel, soumis aux dispositions générales relatives au contrat, et notamment à l’article 1103 du code civil relatif à la force obligatoire.

Aussi, et à titre indicatif, il convient ici d’écarter Monsieur Antoine Jus d’une éventuelle action. En effet, la promesse de porte-fort est un engagement « autonome », qui n’engage que le promettant, à savoir ici François Jus. Une action à l’égard d’Antoine Jus est donc exclue (Cass., Com., 1er avril 2014, n°13-10.629).

La question ici est de savoir si la promesse de porte-fort implique une obligation de moyens ou une obligation de résultat. En cas d’obligation de moyens, François Jus ne pourra être condamné par un tribunal s’il parvient à démontrer qu’il a mis en œuvre tous les moyens possibles en vue de faire en sorte que son frère Antoine vous vende ses part. En cas d’obligation de résultat, le défaut d’accomplissement du fait promis par le tiers, entraîne inexécution par le promettant.

Selon une jurisprudence constante, la promesse de porte-fort enferme une obligation de résultat (Cass., Com., 1er avril 2014, n°13-10.629).

Le nouvel alinéa 2 de l’article 1204 du code civil a consacré cette solution jurisprudentielle en prévoyant que « le promettant est libéré de toute obligation si le tiers accomplit le fait promis. Dans le cas contraire, il peut être condamné à des dommages et intérêts ».

La simple inexécution de l’obligation promise implique donc l’obligation au paiement de dommages et intérêts. En l’espèce, une clause pénale a été spécialement prévue à l’acte pour fixer le montant desdits dommages et intérêts dus en cas d’inexécution.

2/ Le régime de la clause pénale

a/ Les règles applicables

Si l’alinéa 1er de l’article 1231-5 du code civil prévoit que par principe, le montant forfaitaire prévu à titre de clause pénale ne peut être modifié, l’alinéa 2 du même article prévoit que « le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ». Le juge a donc un véritable « pouvoir modérateur » en matière de clause pénale.

Au regard de ce pouvoir modérateur, il conviendrait, même en présence d’une clause pénale, d’apporter des éléments de nature à démontrer un préjudice subi du fait de l’inexécution de l’engagement de porte-fort.

b/ L’application des règles en l’espèce

En l’espèce, le montant fixé s’élève à 980 000 euros ; mais ce montant pourra être modifié librement par le juge.

Afin d’éviter une modération de ce montant, il conviendra de démontrer le préjudice que vous subissez du fait de l’impossibilité de pouvoir acquérir les parts d’Antoine Jus au sein du capital de la société JusLux.

Un des aspects de votre préjudice coule de source : en ne pouvant acheter les parts d’Antoine Jus, vous ne disposez que de 50 % du capital de la société. L’inexécution de l’engagement de porte-fort conduit à votre impossibilité de détenir plus de la majorité du capital social, et donc de prendre des décisions librement. Ce préjudice est d’autant plus important lorsqu’il s’agit de prendre des décisions d’assemblée générale nécessitant un vote à la majorité simple. Aussi, j’ose imaginer que cette situation de détention de capital partagé à 50 % conduit à des situations de blocage qui porte préjudice à l’évolution de la société.

C/ Les effets de la résiliation du contrat de porte-fort par Monsieur François Jus

Vous m’avez indiqué que vous aviez reçu de la part de Monsieur François Jus un courrier vous informant de la résiliation de son engagement de porte-fort.

1/ Les règles applicables

Conformément aux dispositions susvisées, la promesse de porte-fort est un contrat, soumis aux dispositions générales applicables à tout contrat.

Aussi, conformément à l’article 1193 du code civil, « les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise ».

S’agissant des contrats à durée indéterminé (comme il me semble que c’est le cas en l’espèce), l’article 1211 du code civil dispose que « chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable ». Les tribunaux apprécient le délai raisonnable au regard de plusieurs critères : usages, nature du contrat, etc.

2/ Application des règles en l’espèce

En l’espèce, la promesse de porte-fort date de novembre 2016. La résiliation unilatérale date de juin 2019, soit 2 ans et 7 mois plus tard. Au regard des circonstances de l’affaire, à savoir qu’il s’agit d’un engagement de porte-fort important (qui doit vous permettre d’obtenir 100 % du capital d’une société dont vous avez acquis 50 % des parts), avec des enjeux financiers importants (montant de la cession projeté à hauteur de 5 000 000 euros , montant de la clause pénale à hauteur de 980 000 euros), il me semble que 2 ans et 7 mois ne soit pas un délai raisonnable de résiliation.

Ainsi, la résiliation unilatérale de la promesse de porte-fort par Monsieur Antoine Jus pourra être contestée devant le tribunal. Vous pourrez ainsi prétendre que le contrat est toujours valable, et exiger ainsi le paiement de l’indemnité prévue à titre de clause pénale.

D/ Concernant la combinaison d’une action en nullité du contrat de cession de parts et de l’action en paiement de l’indemnité due à titre de clause pénale 

J’attire votre attention dans le cas où l’engagement de porte-fort serait inclut dans le même contrat que l’acte de cession de parts entre la société LawEquity et François Jus.

Dans ce cas, vous ne pouvez solliciter cumulativement la nullité du contrat et l’application de la clause pénale, dans la mesure où l’engagement de porte-fort et la clause pénale qui y est attachée seront également considérés comme nuls.

Deux possibilités :

  • Invoquer la nullité et obtenir la restitution du prix de cession des parts de François Jus, au regard du dol.
  • Invoquer une faute sur le fondement extracontractuel (articles 1240 et 1241 du code civil) et solliciter des dommages et intérêts, au regard du dol.

Et dans ce deuxième cas seulement, vous pourrez également solliciter le paiement du montant prévu au titre de la clause pénale, du fait de l’inexécution de l’engagement de porte-fort.

 

III/ L’action contre l’ancien commissaire aux comptes

A titre liminaire, comme je l’ai mentionné plus haut (I), il est possible de solliciter la nullité du contrat si vous démontrez que le commissaire aux comptes à intentionnellement délivré des fausses informations, ou ne vous a pas fourni une information importante (réticence dolosive), sans laquelle vous n’aurez pas contracté. En effet, l’article 1138 du code civil prévoit que le dol peut provenir d’un « tiers de connivence ». Si vous souhaitez solliciter des dommages et intérêts (fondement extracontractuel), plutôt que la nullité, vous pouvez exercer l’action contre le commissaire aux comptes (A), ou à la fois contre Monsieur François Jus et le commissaire aux comptes (B). Néanmoins, cette « double » action ne vous permettra pas d’obtenir des dommages et intérêts supplémentaires (C).

A/ La possibilité d’agir contre le commissaire aux comptes

Une action contre le commissaire aux comptes est envisageable sur le fondement extracontractuel (articles 1240 et 1241 du code civil).

Comme évoqué ci-dessus s’agissant d’une action en dommages et intérêts contre François Jus, il conviendra de démontrer une faute, un préjudice, et un lien de causalité.

En l’espèce, la faute est constituée par le fait d’avoir communiqué à la société LawEquity une ou plusieurs informations fausses, ou au contraire de ne pas avoir communiqué des informations importantes. Cela peut être le cas par exemple de l’absence de mention dans les comptes de la société d’une provision importante, ou l’oubli de mentionner volontairement certaines charges exceptionnelles, ou tout simplement des comptes falsifiés (mention d’une trésorerie faussement élevée ou de créances inexistantes).

Le préjudice pouvant être invoqué peut-être la perte de chance d’avoir pu mieux négocier le prix de cession et la perte de chance d’avoir pu réaliser un autre investissement, en achetant les parts d’une autre société concurrente avec laquelle vous étiez peut-être également en relation. Le lien de causalité entre la faute précontractuelle et le préjudice dont il pourra être demandé réparation sera plus facilement démontré.

B/ La possibilité d’agir à la fois contre le commissaire aux comptes et Monsieur François Jus

Je vous recommande d’agir contre Monsieur François Jus et son ancien commissaire aux comptes, qui peuvent être considérés comme co-auteurs du préjudice.

Il conviendra alors de solliciter leur condamnation solidaire au paiement de dommages et intérêts. Chacun sera alors tenu au paiement de l’intégralité des dommages et intérêts prononcés (obligation à la dette). Celui qui vous aura versé l’intégralité des dommages et intérêts pourra se retourner contre l’autre (contribution à la dette).

C/ Sur le principe de réparation intégrale

1/ Énonce du principe

Vous m’avez consulté sur la possibilité d’agir contre le commissaire aux comptes, « en même temps », afin d’obtenir « réparation pleine et entière » de vos dommages.

Il est important que vous sachiez néanmoins qu’il existe en droit français un principe de réparation intégrale. Ce principe signifie que la victime doit recevoir l’exacte contrepartie du préjudice subi, sans s’enrichir du fait de l’indemnisation (en ce sens : Cass., Civ.1re, 9 novembre 2004, n°02-12.506).

2/ Application du principe en l’espèce

En l’espèce, le préjudice est identique, s’agissant de la faute de François Jus et de la faute du commissaire aux comptes : la perte de chance d’avoir pu mieux négocier le prix de cession et la perte de chance d’avoir pu réaliser un autre investissement.

En conséquence, une action combinée contre François Jus et le commissaire aux comptes ne vous permettra d’obtenir le paiement de dommages et intérêts « supplémentaires ».

A titre purement informatif, sachez que si vous décidez d’agir uniquement contre François Jus sur le fondement d’un mensonge ou d’une réticence dolosive émanant du commissaire aux comptes, François Jus pourra décider d’attraire au litige le commissaire en comptes, en vue d’être relevé et garanti des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui par le tribunal.

 

Cette page est une simple proposition de correction de l’épreuve de droit des obligations du CRFPA 2019.

Voir aussi: correction droit civil du CRFPA 2019

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